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Calendrier de l’avent : 19

Manhattan

30 Mai 2012

11 h 43 pm

Téléphone de la cabine
J’te présenterai ma frangine cocaïne
Viens becqueter dans ma cuisine
Tu goûteras à ma copine protéine
Si tu swingues dans le timing
T’auras droit aux multivitamines
New York, New York, New York…

Si tu es dans la détresse
J’te présenterai une gonzesse qui caresse
Qui t’fait cracher tes dollars
A peu près comme un tubard ses kleenex
Si t’es pas dans le tempo
Elle t’éponge, et puis ciao, ça presse
New York, New York, New York…

Bernard Lavilliers : Rock City

— Stop ! hurla soudain Lisa.

Le taxi pila brutalement,  derrière lui, personne pour klaxonner. Lisa sortit et resta un instant au milieu de la rue. Elle se trouvait à l’angle nord-est de la 7th Avenue et de la 33th Rue. Peter descendit à son tour et la rejoignit, il regarda dans la même direction et aperçut le Houdini Museum.

— Est-ce qu’Houdini fait partie des fantômes de New York ? demanda-t-elle.

— Je n’en sais rien, dit Peter. Je ne les connais pas tous. Nous devons être des millions. Pourquoi cette question ?

Lisa ne répondit pas. Elle traversa la rue, non sans avoir regardé machinalement à gauche et à droite et pénétra dans le musée suivie par Peter qui indiqua au chauffeur de les attendre. Les lieux étaient vides. Elle s’arrêta devant un cercueil d’où s’était évadé Harry Houdini en 1907, alors qu’il était menotté, après avoir répondu favorablement aux organisateurs du marathon de Boston. Il ne lui avait fallu que soixante-six minutes pour réaliser cet exploit.

Ils continuèrent de visiter les différentes pièces sans rencontrer âme qui rode. Ce musée était dédié à la gloire du plus grand des magiciens, comme il se proclamait. Lisa étudiait les habits, les affiches et une idée fit son chemin dans son esprit.

            — Lennon n’est pas mort, dit-elle devant le portait du célèbre magicien.

— Tu penses qu’il est toujours là, parmi nous ?

— Si je suis ta logique et celle de Charlie Parker, oui. Tu m’as dit qu’un fantôme ne pouvait pas mourir. Alors je pense plutôt à un enlèvement ou à une disparition volontaire.

— Des centaines de personnes étaient présentes dans la salle, et lui seul sur la scène. Il a disparu comme par enchantement.

— Les projecteurs ont détourné l’attention. Regarde ici, Houdini a été capable de s’évader, même enfermé dans un cercueil. Alors il a très bien pu faire disparaître Lennon. En plus sur la scène du Madison Square Garden, il doit exister des possibilités pour un magicien de truquer le plateau.

— Mais pour quel mobile ?

Calendrier de l’avent : 18

— Toi le premier.

Peter hésita avant de répondre.

— Ne me dis pas le contraire, continua Lisa, je le lis sur ton visage. Ce n’est pas une vie, si je puis dire.

— Tu as raison, nous avons tous des envies de suicide, mais cela nous est impossible, la mort, la vraie nous est inaccessible. Et c’est peut-être l’enfer ici, pas le purgatoire. Mais cela ne résout pas notre problème.

— Tu te trompes. Si John Lennon n’a pas été tué, on l’a enlevé ou alors il a disparu de lui-même. Retournons au Madison Square Garden. Je veux revoir les lieux, je suis sure que la solution s’y trouve.

Elle se leva et descendit les marches, Peter la rejoignit.

— On peut prendre un taxi ? demanda-t-elle, je n’ai pas envie de retourner dans le métro, cela me donne le cafard.

— Pas de problème, il y aura bien un chauffeur fantôme qui nous verra. Il faut attendre un peu plus que dans ton monde.

Un taxi s’arrêta au bout de deux minutes. Ils montèrent à l’arrière et Peter lui demanda de les conduire au Madison Square Garden.

— Pour le métro, je pense comprendre le fonctionnement, dit Lisa, vous prenez le même que pour les vivants, mais vous ne les voyez pas et eux non plus. Mais pour les taxis, je ne saisis  pas. Pourquoi des fantômes continuent à les conduire ?

— Parce qu’ils ne savent rien faire d’autre, répondit Peter, passer des heures assis sur un banc devant la statue de la Liberté, cela va un jour. Eux au moins ils ont un but : conduire des fantômes, discuter avec eux. Moi je n’ai rien, je passe mes journées à me promener. Les artistes, eux, sont peut-être ceux qui ont le plus de chance, ils peuvent continuer leur art.

— Ce n’est pas ce que pensait Charlie Parker.

— Disons que c’est l’idée que j’avais mais peut-être que c’est aussi dur pour eux.

Calendrier de l’avent : 16

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Manhattan

30 Mai 2012

10 h 32 pm

Puisqu’à l’heure où Broadway s’agite,
nous dansons sur le toit.
du 218 Adam Street.
Moi Robert, toi Lisa.

Qu’importe, New York, New York si ta voix porte.

Sur le pont de Brooklyn, ma petite amoureuse
défiait les buildings, comme une enfant teigneuse.

Alex Beaupain : Brooklyn Bridge

 

Ils quittèrent le Madison Square Garden et s’engouffrèrent dans Penn Station. Lisa remarqua que les couloirs étaient désespérément vides, parfois ils croisaient un homme et une femme, qui ne les regardaient pas. Ils arrivèrent sur le quai et attendirent la rame.

Lisa remarqua qu’elle ne sentait aucune odeur, comme si les lieux étaient totalement aseptisés.

Le métro arriva et ils montèrent. Lisa nota que la rame était inoccupée et en fut surprise. Jamais elle n’avait vu une rame de métro vide à New York, même à quatre heures du matin, car le métro fonctionnait vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Comme la ville, il ne s’arrêtait que lors des tempêtes, quand l’eau s’engouffrait dans les sous-sols.

Ils arrivèrent finalement à la station Chambers Street. Ils quittèrent la rame et la musique arriva jusqu’à eux. Ils la suivirent et débouchèrent dans une salle de la station où une centaine de personnes étaient présentes, entourant deux joueurs de saxo.

            — Celui de droite c’est Charlie Parker.

            Bird pensa Lisa en se souvenant du film que lui avait consacré Clint Eastwood.

            — Lui aussi mort à cause de la drogue en 1955 à New York. Et il est toujours là.

            — Et l’autre ?

            — Aucune idée, sans doute un amateur.

            Lisa s’installa contre le mur et écouta. Les deux musiciens rivalisaient de virtuosité. Elle remarqua que Charlie Parker ne cherchait pas à écraser son adversaire d’un jour, au contraire, il le mettait en valeur.

Le duel devint un véritable duo. Les deux musiciens se lâchaient complètement. Lisa savoura cet instant de pur bonheur. Encore une fois, elle comprit qu’elle ne pourrait jamais se débarrasser de la musique comme elle l’avait cru pendant des années.

            Ils terminèrent dans un final endiablé et les applaudissements crépitèrent. Charlie Parker serra très fort l’autre musicien contre lui et le félicita. Peter et Lisa allèrent à leur rencontre.

Calendrier de l’avent : 15

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— Une battle, deux musiciens ou deux chanteurs jouent chacun leur tour devant des admirateurs. C’est Charlie Parker qui a lancé cela. Un jour il a entendu un amateur jouer dans le métro. Il a sorti son saxo et l’a rejoint. Cela a donné des idées à d’autres. Il passe leur le temps. Tu sais, nos journées sont longues alors nous nous occupons comme nous pouvons.

Calendrier de l’avent : 14

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— Oui, répondit Peter. Il s’agit de la fille d’un de mes collègues, elle travaille au New York Police Department.

— Vous allez le retrouver ? demanda Marilyn en fixant Lisa d’un regard suppliant.

Lisa ne sut quoi dire, elle n’en revenait pas d’être face à la femme qui avait fait fantasmer des milliers d’hommes et qui, cinquante ans après sa mort, continuait d’être une des plus grandes actrices à la beauté fatale.

— Je l’espère, lâcha-elle d’une voix timide.

— Vous le devez, murmura Marilyn de sa voix douce. Il est si gentil, et c’est le meilleur musicien au monde.

— Qu’il crève ! Il n’a rien à faire à New York, c’est une saleté d’Anglais qui a dénaturé notre musique. Je suis morte trop tôt pour lui montrer de quoi j’étais capable.

La voix avait jailli dans le dos de Lisa ; elle se retourna et aperçut une femme noire, plutôt petite, avec de longs gants blancs qui cachaient ses avant-bras, vêtue d’une simple robe noire, et des gardénias décorant ses cheveux. Mais le plus frappant restait la haine qu’elle cracha à la figure de Marilyn Monroe :

— Et toi, repars à Los Angeles, ou à Hollywood. Ta place n’est pas à Manhattan. New York est la ville du jazz, pas de la soupe.

Peter prit la femme par le bras. Mais elle se débattit, donnant des coups de pieds en hurlant :

— Saleté de flics, vous m’avez pourri ma vie et vous continuez maintenant. Mais au moins, ici, vous ne pouvez pas me mettre en prison. Je suis libre.

            Le couple disparut dans le couloir, mais pas les cris de la femme qui maudissait toujours les musiciens anglais volant la vedette aux vrais chanteurs puis les flics new yorkais racistes.

  • Je vais poursuivre la répétition, si je peux, dit Marilyn. Et merci pour votre aide.

Lisa voulut lui demander qui était cette femme jalouse, mais déjà Marilyn lui tournait le dos. Elle la regarda se diriger vers la scène avec une pointe de jalousie. Elle essaya de faire le point sur la situation.

Elle laissa de côté les questions sur ce monde de fantômes, elle ne devait pas se laisser distraire par cet aspect du problème. Elle se doute qu’elle n’obtiendrait sans doute jamais les réponses à ses nombreuses questions. Elle devait se concentrer sur l’essentiel : retrouver John Lennon.

Elle marcha dans le couloir et regarda les affiches de tous les spectacles qui s’étaient déroulés au Madison Square Garden. Elle s’arrêta devant l’affiche du concert de John Lennon en 1972, celle d’Elvis, de Frank Sinatra, de Bob Dylan. Puis ce fut au tour des joueurs de l’équipe de basket-ball des Knicks ou des Rangers en hockey sur glace. Elle examina toutes ces stars qui avaient chanté, dansé, joué sur cette scène.

— Désolé, murmura Peter en revenant.

— C’était qui ? demanda Lisa, j’ai l’impression de la connaître.

— Billie Holiday.

— Lady Day ! La plus grande chanteuse de jazz. Je ne l’aurais jamais reconnue.

— Même chez les fantômes, trente ans de drogue et d’alcool, cela ne pardonne pas. Chaque année, elle rêve de chanter lors du spectacle, mais personne ne l’a prise. Tu as vu, elle est ingérable.

— Pourtant elle possédait une voix magnifique.

— Oui, malheureusement jusqu’au bout elle a connu la drogue. Elle a dit un jour qu’elle s’était laissée mourir pour ne pas retourner en prison. Elle a gagné, ici la prison n’existe pas, quoique nous sommes une immense prison. Nous ne pouvons pas sortir des limites de New York. Une fois que nous avons choisi notre lieu de purgatoire, nous ne pouvons pas le quitter.

— Elle pourrait être liée à la disparition de Lennon ?

— Possible, je t’ai parlé des noms que j’avais ? Ce sont des musiciens de jazz, il ne voulaient pas de concert avec un Anglais et une star de cinéma. Je sais à quelle station de métro ils font une battle.

— Une quoi ?

Calendrier de l’avennt : 13

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La voix rocailleuse avait jailli derrière Lisa qui se retourna aussitôt. Un jeune homme vêtu d’un T-shirt troué, orné d’une croix gammée, d’un jeans déchiré, s’avança dans l’allée en continuant de vociférer de plus belle. À ses côtés, une jeune fille totalement hystérique hurlait à l’unisson.

— Ouais, virez la vieille. Aux chiottes, place aux jeunes. Y en a marre de cette musique de ringards.

Des voix s’élevèrent sur les gradins pour faire taire le couple qui continua de plus belle, encouragé par les lazzis et les quolibets désobligeants qui pleuvaient sur eux.

— Tu peux commencer par eux, lâcha Peter. Sid et Nancy.

— Elle ne lui en veut pas de l’avoir tué ? dit Lisa, en se remémorant leur histoire.

Sid Vicious et Nancy Spungen. Un couple maudit. Après avoir quitté le groupe punk des Sex Pistols, Sid avait plongé dans l’héroïne, initié par Nancy. En octobre 1978, dans un des hôtels les plus réputés de New York : le Chelsea hotel qui avait vu Arthur C. Clarke écrire 2001 l’odyssée de l’espace, la police new-yorkaise avait découvert le corps sans vie de Nancy, poignardé. Un avocat bien rémunéré avait réussi à faire croire à une histoire de dealers. Sid avait été libéré, mais  avait encore plus sombré dans la drogue. Deux mois plus tard, il mourrait victime d’une overdose.

— Non, ils sont toujours ensemble, à se promener en hurlant dans New York. Si tu veux les interroger, je te souhaite du plaisir !

Lisa haussa les épaules et fixa les deux jeunes punks se diriger vers la scène sous le regard horrifié de Marilyn Monroe qui s’éclipsa. Plusieurs fantômes essayèrent de les arrêter, mais c’ »tait mission impossible. Sid Vicious arriva à ses fins, il s’installa face au public et chanta My way de sa voix éraillée sous les huées de l’immense majorité des participants. Seul un petit groupe d’une dizaine de personnes l’encouragea à poursuivre.

— Tu penses vraiment qu’ils répondront à un flic qui ne peut plus rien contre eux ? demanda Lisa. N’oublie pas, je ne peux pas les menacer, ils sont déjà morts. Non, je ne pense pas qu’ils aient tué Lennon.

— Pourtant quand il était vivant, Sid Vicious était connu par sa brutalité.

— Oui, mais pas pour son intelligence. Celui qui a tué Lennon est instruit. Si j’accepte ton hypothèse, il a trouvé un moyen radical pour éliminer les fantômes. Au fait, pas d’autres disparitions avant ou depuis ?

— Pas à ma connaissance.

— Allons voir les lieux du crime.

Peter l’amena sur la scène où Sid Vicious continuait à massacrer la chanson. Il lui montra où se tenait Lennon, puis lui désigna au plafond l’endroit où se trouvaient les deux projecteurs.

— Bon, essaye de savoir si d’autres musiciens étaient contre le choix de Lennon pendant que je regarde une dernière fois au cas où j’aurais manqué un détail important.

Lisa examina minutieusement l’endroit, mais ne trouva rien d’intéressant et elle n’avait pas les moyens techniques pour relever des indices. De plus les fantômes ne laissaient pas de traces. Elle comprit qu’elle faisait fausse route. Elle pouvait envoyer la technologie aux oubliettes, elle devait retrouver son instinct de flic. C’est tout ce qui lui restait. Seulement elle ne voyait pas comment elle pourrait résoudre cette affaire en si peu de temps.

— J’ai trouvé quelques noms, dit Peter en la rejoignant.

— Ils sont dans la salle ?

— Non, dans le métro.

— Tant mieux, quittons cet endroit. Je ne supporte plus de l’entendre éructer. S’il n’était pas mort, je crois que je l’aurais étranglé de mes propres mains.

Peter l’entraîna dans les coulisses pour éviter de passer par la salle. Ils croisèrent plusieurs personnes qui saluèrent Peter de la tête, quand une voix suave se fit entendre derrière eux.

— Monsieur Mohogan, attendez une seconde.

Ils se retournèrent. Marilyn marchait dans leur direction avec de petits pas à cause de sa robe lui collant au corps.

— C’est la dame qui vient du monde des vivants ? demanda-t-elle en souriant à Lisa.

Calendrier de l’avent : 12

— Nous verrons le résultat, dit le petit homme en quittant les lieux non sans avoir jeté un regard de haine à Lisa.

— C’est Edgar Allan Poe ? demanda, incrédule, Lisa.

— Lui-même. Quand il a appris la disparition de Lennon, il a sauté sur l’occasion en disant partout qu’il retrouverait son assassin, qu’il était le plus grand détective de la ville.

— Ce qui peut faire de lui un suspect.

— Non, il ne se trouvait pas sur les lieux. Tu peux le rayer de la liste.

— Encore faudrait-il que j’aie une liste. Pour l’instant, je suis dans le noir complet.

Peter ouvrit une porte et ils arrivèrent dans la salle de spectacle. De nombreuses personnes se tenaient aussi bien dans les gradins que dans la fosse, face à la scène. 

Lisa regarda les personnes qui déambulaient autour d’elle sans lui prêter la moindre attention. Peter la guida vers la scène plongée dans une semi-obscurité.

— Commençons par le début, dit Lisa. Le lieu de la disparition.

— En face de toi, Lennon était assis devant son piano blanc et jouait Instant Karma. Une centaine de personnes assistait à la répétition. Soudain, une lumière aveuglante a jailli d’un projecteur qui a explosé, suivi par un autre. Quand on a ouvert les yeux, Lennon avait disparu, à sa place s’élevait de la fumée grise. Plusieurs musiciens se sont précipités vers l’endroit où il se trouvait, mais il ne restait que cette fumée qui montait du tabouret où il était assis.

— Et si c’était un simple accident, une combinaison de lumières, de produits ?

— Ce serait trop beau, trop facile. De plus je te l’ai dit, les fantômes ne meurent jamais. Sauf sur le pont de Brooklyn quand leur heure est venue, et encore je n’en suis pas sûr.

— Bon, admettons, dit Lisa qui n’avait pas l’air convaincu. Maintenant, voyons le mobile. Pourquoi s’en prendre à Lennon ? Il avait des ennemis parmi les fantômes ?

— Notre monde ressemble à celui des vivants. Jalousie, mépris, haine sont monnaie courante. Mais nous ne pouvons pas nous tuer : je peux poignarder quelqu’un, lui tirer trente balles dans le corps, il ne se passe rien. Pas de sang, pas de douleur. Je te l’ai dit, ce n’est pas le paradis. Nous ne mangeons pas, nous ne faisons pas l’amour, nous ne buvons pas, nous ne fumons pas, nous ne nous droguons pas. Les artistes peuvent continuer à peindre, à écrire, à chanter, ils ont toujours un public. Et encore…

— Je ne sais toujours pas qui pouvait en vouloir à Lennon. Qui a décidé qu’il organiserait le concert ?

— Les musiciens choisissent en comité, entre eux. Tous les ans le responsable tourne.

— Commençons par eux. Certains voulaient-ils être le patron cette année ?

— Je vais poser la question.

À cet instant, un projecteur s’alluma et éclaira la scène. Lisa demeura interdite, incapable d’articuler le moindre mot.

Sous cet unique faisceau lumineux, entourée par l’obscurité, se tenait une femme, à la beauté incendiaire. Lisa la reconnut aussitôt. Elle n’était pas née quand elle était morte, mais son visage, sa silhouette hantaient encore toutes les mémoires.

Le silence tomba brutalement dans la salle. Des notes arrivèrent et ce fut au tour de la voix, sensuelle, douce, de prendre le relais du physique. Des images d’un autre Madison Square Garden, d’une autre scène, d’une autre chanson apparurent dans l’esprit de Lisa. C’était un hymne pour l’homme le plus puissant du monde, pour son anniversaire.

— Elle demeurera à tout jamais belle, dit Peter qui était lui aussi fasciné. John Lennon l’a choisie pour être l’interprète principale de son spectacle. Et elle a toujours aimé New York.

Lisa ne sut quoi répondre, Marilyn Monroe chantait et elle n’en revenait pas, de l’entendre, de la voir, même si ce n’était qu’un fantôme. Par son unique présence, elle avait réussi à éteindre toutes les conversations.

— Dehors ! Place à du sang neuf !

Nostalgie.

Ode à ces lieux qui faisaient l’âme de New York avant la pandémie

pour lire l’article : Ode à ces lieux qui faisaient l’âme de New York avant la pandémie (courrierinternational.com)

Le New York Magazine consacre sa une aux lieux du quotidien qui ont dû baisser le rideau. Ces bars, commerces, salons de coiffure qui nourrissaient l’identité de la ville et dont la crise sanitaire et économique a eu raison.

“Tout a disparu”. Le constat du New York Magazine est clair : au terme de cette année de crise sanitaire, la Grosse Pomme n’est plus ce qu’elle était. La chute vertigineuse de l’activité économique de la ville est sans précédent, et la “ville qui ne dort jamais” s’est transformée en “ville fantôme”.

“D’après les estimations du Partnership for New York City [une association qui regroupe des entreprises new-yorkaises], un tiers environ des 240 000 petites entreprises de la ville ne tiendront pas jusqu’à la ‘terre promise’ d’après le vaccin”, assène le magazine. Cette année, les rêves des New-Yorkais ont été mis sur pause.

Nostalgie.

Ode à ces lieux qui faisaient l’âme de New York avant la pandémie

Publié le 11/12/2020 – 10:35

Le New York Magazine consacre sa une aux lieux du quotidien qui ont dû baisser le rideau. Ces bars, commerces, salons de coiffure qui nourrissaient l’identité de la ville et dont la crise sanitaire et économique a eu raison.NOS SERVICES

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“Tout a disparu”. Le constat du New York Magazine est clair : au terme de cette année de crise sanitaire, la Grosse Pomme n’est plus ce qu’elle était. La chute vertigineuse de l’activité économique de la ville est sans précédent, et la “ville qui ne dort jamais” s’est transformée en “ville fantôme”.

“D’après les estimations du Partnership for New York City [une association qui regroupe des entreprises new-yorkaises], un tiers environ des 240 000 petites entreprises de la ville ne tiendront pas jusqu’à la ‘terre promise’ d’après le vaccin”, assène le magazine. Cette année, les rêves des New-Yorkais ont été mis sur pause.https://9506caf799792c2995daaa5028de28a0.safeframe.googlesyndication.com/safeframe/1-0-37/html/container.html

Une partie de l’identité de la ville

Et c’est en partie pour cela qu’en cette fin d’année le New York Magazine a choisi de consacrer sa une aux lieux qui ont fermé leurs portes dans cette ville habituellement “​si agitée”. Son numéro annuel consacré aux “raisons d’aimer New York” prend, en 2020, des airs de requiem. Il est titré : “Adieu, les amis”.

C’est “une ode aux endroits qui définissaient nos vies ici” sous la forme d’une mosaïque de croquis reflétant la diversité des commerces frappés – tant économiquement que moralement – par les mesures sanitaires : salons de coiffure, bouis-bouis, salles de concert, salles de sport, discothèques, bars…

Le journal salue tous ces endroits qui ont rythmé le quotidien des New-Yorkais, “qui nous ont permis de faire communauté, de nous vêtir de nouvelles identités contre de l’argent”. Car, sans ces lieux, c’est une grande partie de l’identité de New York qui s’évapore :

Que devient cette ville si tant de ses établissements disparaissent définitivement du jour au lendemain ? Quelles sont les conséquences pour l’inconscient collectif quand une ville perd tout son environnement urbain, ses références culturelles, ses souvenirs, ses désirs et ses aspirations ? Et qu’est-ce que ça implique pour le prochain Jake Shears [l’un des chanteurs des Scissors Sisters] de ne pas pouvoir tenir ce concert en attendant d’être célèbre ?

Tâchons cependant de ne pas nous morfondre, car si des commerces ont disparu, d’autres vont forcément renaître, dans une ville qui aura beaucoup changé une fois la pandémie passée, rassure le New York Magazine. La forme de ce nouveau New York demeure incertaine mais, le journal en est persuadé, elle sera inédite.

Consacré pour une bonne part à la ville de New York, ce magazine est aussi réputé pour ses longs formats sur la vie culturelle et politique américaine. Né en 1964 comme supplément dominical du New York Herald Tribune et relancé comme hebdomadaire indépendant en 1968, New York a servi de modèle à de nombreux magazines urbains aux Etats-Unis, sachant capter l’air du temps grâce à ses couvertures audacieuses et à la plume talentueuse d’auteurs comme Tom Wolfe. Sa grande période a pris fin en 1976 avec son rachat par Rupert Murdoch. Depuis 2003, il appartient à la famille du financier Bruce Wassertein et a connu un renouveau salué par de nombreux prix. Fidèle à sa double vocation, il fait office de guide culturel et gastronomique de la Grosse Pomme tout en étant très respecté pour sa couverture de la politique. En 2014, il est devenu bimensuel.

Très complet, le site NYmag.com tient lieu de guide de la ville et des sorties. Il permet d’effectuer des recherches thématiques (musées, magasins, restaurants), mais propose également des articles sur l’actualité culturelle, sociale et politique.

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Calendrier de l’avent : 11

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Manhattan

30 Mai 2012

09 h 12 pm

J’ai rêvé New York, New York City sur Hudson.
Babylone, tu te shootes et tu rêves
Babylone, tu fumes trop et tu crèves.
Babylone, tu exploseras sur un graffiti de New York !
Quand il pleut des cordes – Roule en Ford
Si tu veux faire mac – Roule en Cadillac
Si tu veux faire chic – Roule en Buick
Si tu es Rockfeller – Roule en Chrysler
J’ai rêvé New York, New York City sur Hudson.

Yves Simon : J’ai rêvé New York

Ils pénètrent dans l’immense salle où Lisa avait souvent accompagné son père pour voir des matchs de basket des Kniks.

Le Garden, comme l’appellent les New-Yorkais, se trouve sur la 7th Avenue entre la 31th et la 33th Rue, près de Pennsylvania Station. Mais avant cet emplacement, trois autres Garden avaient existé. New York était une ville qui bougeait, qui ne restait pas en place.

— Et maintenant, si tu m’expliquais, dit Lisa en marchant dans le gigantesque hall. Que faisons-nous ici ?

— Nous nous trouvons sur les lieux du crime. Tous les ans, pour le solstice d’été, un grand concert est organisé par les artistes morts pour tous les fantômes présents dans la ville. Cette année, John Lennon était chargé de le superviser. Choix des artistes, des chansons, des chorégraphies, il était le maître d’œuvre. Avant-hier, il se trouvait sur la scène au piano, devant plus de deux cents personnes et, tout à coup, il s’est volatilisé. Depuis il est introuvable.

Lisa ne put s’empêcher de rire, un rire nerveux.

— Et tu veux que je le retrouve, dit-elle d’un ton cassant.

— Non, que tu retrouves celui qui a réalisé cette prouesse. Tu ne comprends pas : si quelqu’un peut tuer un fantôme alors nous sommes tous condamnés. Et nous ne pourrons pas atteindre ce que certains pensent être le paradis. A quoi serviraient ces années passées à se morfondre ici ? Tu ne peux pas savoir notre souffrance, je ne te le souhaite pas.

— Mais pourquoi n’enquêtes-tu pas ? Pourquoi venir me chercher ? Ne me dis pas que tu es le seul policier à hanter ce New York.

— Bien sûr que non, nous sommes nombreux, moins que ceux que nous avons arrêtés. Mais nous sommes tous sur la liste des suspects. C’est pour cela que j’ai suggéré ta présence. Tu es une personne neutre.

— Et j’ai une dizaine d’heures pour résoudre cette énigme ?

— Oui, et même un peu moins maintenant.

— Tu as vraiment confiance en moi. En plus, je pense qu’il n’existe ni empreinte, ni trace.

— Oui, j’ai confiance en toi et oui, nous ne sommes pas dans Les Experts Manhattan. Tu vas devoir te fier uniquement à ton instinct de flic.

Soudain un homme se planta devant eux. Pas très grand, la chevelure noire en bataille, une petite moustache noire barrait un visage émacié.

— Mohogan, je vous avais dit que c’était inutile de ramener un vivant parmi nous. Il n’a pas sa place. Je trouverai le coupable, pas besoin d’aide extérieure.

Le visage de Peter se ferma.

— Monsieur Poe, nous en avons discuté et la décision a été prise à la majorité.